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Quand parler

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Depuis un moment, depuis plus d’un an, je refuse et j’essaye de refuser les sollicitations pour participer à des rencontres et débats, à des podcasts. Essentiellement en rapport avec mon essai personnel, Au-delà de la pénétration, livre dont je ne pouvais prévoir le destin. Le refus, c’est ma première réponse. Je propose d’autres noms, des femmes, des militantes. C’est un ressenti personnel en partie : on m’a beaucoup entendu, j’ai beaucoup parlé. J’avais l’impression de me répéter, et surtout d’être le mec de service, le contre-exemple et ça ne me semble pas juste, je ne suis pas meilleur, pas plus juste (et d’ailleurs je ne m’identifie pas comme mec, mais c’est une autre histoire). Je ne voudrais pas avoir l’air de faire la leçon, je ne suis pas un modèle, je ne suis qu’une pauvre personne humaine imparfaite. Je suis heureux si j’ai pu apporter des choses, mais des femmes militent depuis tellement longtemps, des femmes et des personnes racisées, handies, trans, et elles ont tellement à apporter. Moi je continue, mais de façon plus souterraine, dans mes livres, ailleurs.

Donc j’ai beaucoup dit non.

Ensuite si une militante me demande d’intervenir, je suis disponible bien sûr. Ça me semble être une bonne règle. Être là si on me demande, non sans avoir donner d’autres noms que le mien.

C’est un truc que j’ai appris ces dernières années : ne pas parler, ne pas donner mon avis. J’étais très enthousiaste au départ, parce que je voyais bien que mon livre cassait l’ambiance et à la fois était une ressource et un soulagement pour plein de personnes (des meufs évidemment, pour le coup les mecs n’ont quasi pas été là). Je n’ai jamais reçu autant d’emails, de messages sur insta et facebook et twitter. C’était incroyable et bouleversant. Donc j’ai pu beaucoup parler, trop, aussi car ce livre a été compliqué à publier et à republier. Maintenant : se taire sur ce sujet. C’est pour ça qu’on a publié Lou, Pauline et Zig. Pour donner la parole.

Et puis j’ai d’autres choses à raconter. Et là : ne pas se taire.