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Ma vie parmi les livres (dessus, dedans, à côté, heureusement intoxiqué)

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Beaucoup de beaux livres en ce moment. Je viens de terminer le deuxième tome Du Bel âge de Merwan, dessin toujours superbe. Let’s kill uncle, de Rohan O’Grady (qui a été une des sources d’inspiration de Wes Anderson pour son beau Moonlight Kindgom : un garçon et une fille sur une île font alliance pour survivre) (et il y a un dessin d’Edward Gorey à l’intérieur, que demander de plus), Passions, un livre sur la princesse de Clèves par Jean-Michel Delacomptée (je le commence juste et c’est déjà extra). Lu aussi le très beau intelligent Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? de Jeanette Winterson.

Dix minutes sur la création par Quentin Blake ici (et Michael Rosen sort en septembre un Fantastic Mr Dahl -sur ma liste d’achats). Et si Blutch faisait ça ? Ou d’autres. J’aime écouter les artistes parler travail. Quand j’aurai un peu plus de cheveux blancs je le ferai.

Je corrige une dernière fois mon Apiculture selon Samuel Beckett. C’est Chloé Poizat qui fait l’illustration de couv. Il y a tellement d’illustrateurs et de dessinateurs talentueux qu’il est honteux de ne pas faire appel à eux pour créer de belles couvs. Je vais essayer d’en faire ma règle, j’ai le sentiment que mes éditeurs commencent à être sensibles aux belles couvs, et à l’intérêt d’en faire une occasion de création originale (les banques d’images c’est de la paresse).

Découverte du travail de Jean Jullien, grâce à Jean-Baptiste qui était en visite ici quelques jours (notre roman graphique est quasi terminé).

Parmi les sorties amicales de la rentrée : le nouveau roman de Jakuta Alikavazovic, celui de Thierry Hesse, et un essai d’Eric Pessan sur The Shining de Stephen King. Le Brut de Dalibor Frioux sort en poche.

Clément peaufine les derniers détails à notre Banc de Touche, à paraître le 4 octobre chez Warum (collection Vraoum). Un extrait ici !

C’est Jean-Baptiste qui le premier m’a parlé de RO Blechman. Je connaissais Steinberg et Jules Feiffer, pas Blechman, pourtant un des garçons de la bande. C’est fou d’être passé à côté d’un artiste de ce niveau, mais merveilleux tout de même de constater qu’il reste des oeuvres importantes à découvrir. Tout le monde devrait avoir dans sa bibliothèque son Talking Lines (préface de Seth – et son Behind the Lines est préfacé – bonheur – par Maurice Sendak) : courtes histoires graphiques, dessins, commentaires aussi. Un trésor. Le livre est une invention incroyable et nous ne sommes qu’au début de son histoire. C’est un objet parfait, émouvant, comme un univers, une galaxie promise à nos aventures. A lire du même auteur son Dear James, un livre sur la création, sorte de Lettres à un jeune poète destinées à un jeune dessinateur (c’est pareil). Je pense à ce poème de Rilke : « D’ici il n’y rien qui ne te voit pas. Tu dois changer ta vie » Denn da ist keine Stelle, die dich nicht sieht. Du mußt dein Leben ändern).

Hier soir avec Julia W., Glen C et Yann L., nous avons vu un des derniers Capra (en couleur) : Pockettful of miracles, remake de son propre Lady for a day. Dans mon souvenir le film original (noir et blanc) était moins long (et c’était mieux), mais là aussi : quand la gentillesse et la délicatesse donnent du grand art. On discutait avec Dalibor de cette phrase toute faite « On ne fait pas d’art avec des bons sentiments ». On était d’accord pour dire que d’émotions noires on pouvait créer de la beauté, et de la douceur. C’est juste un pétrole. La question c’est ce que nous faisons de nos énergies noires, si on les transforme ou pas, si on se laisse dévaster par elles, ce à quoi elles nous servent. Je pense à cet article où un journaliste titrait : « Les grands artistes sont des pervers sexuels ». C’est tellement caricaturallement branché, tellement idiot. Cette jouissance pour la part sombre (avec cette mentalité bourgeoise d’essayer de choquer en parlant de sexe) et la certitude que parce que c’est sombre alors c’est supérieur, quelle connerie. Un artiste comme Blechman est à l’opposé de ça, et bon dieu ça fait du bien.

RO Blechman par Maurice Sendak (Behind the Lines)