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vendredi soir

Je termine un roman pour la collection medium de l’école des loisirs. Je retrouve les personnages de Traité sur les miroirs pour faire apparaître les dragons. Quand on écrit pour les adolescents on écrit à cet adolescent que l’on était soi-même, on lui donne des trucs et des savoirs pour traverser ces années sans trop de dommage et de tristesse. En tout cas c’est mon cas.

Je prends le train pour Bruxelles demain matin, pour le salon du livre. J’y retrouve Camille des éditions de l’Oliver et Geneviève Brisac (dont un nouveau livre sort ces jours-ci). Retour dimanche. Je suis habitué aux voyages éclairs ces temps-ci : sur un coup de tête j’ai pris un train pour Paris mardi midi et je suis rentré mercredi midi. Hm un coup de tête, pas vraiment: j’avais mal au ventre et j’étais inquiet. Réveil d’hypocondrie. J’ai vu mon médecin et tout va bien en fait. C’est la consultation qui m’a coûté le plus cher dans ma carrière de pseudo-malade, évidemment, et je crois que l’assurance maladie ne rembourse pas les billets de train. J’en ai profité pour acheté des livres. Le maître ignorant de Jacques Rancière, le dernier Dennis Lehane et un livre sur Chris Ware (passionnant, je suis en train de lire l’entretien). Les maladies que l’on imagine nous font voyager ; c’est une manière de se mouvoir. Mais je ne suis plus qu’un hypocondriaque dilettante, il faut croire que la psychanalyse fonctionne dans mon cas, c’est un chamanisme qui me correspond bien. Cela faisait cinq mois que je n’étais pas allé chez le médecin. Un record. Vivre en pleine nature pour une année calme mes angoisses. Je ne sais pas s’il y a quelque chose de thérapeutique dans la nature, en tout cas les grandes villes sont nocives.

Soirée lecture à l’akademie schloss solitude. Deux écrivains ont lu des textes écrits pour l’occasion ou bien des nouvelles déjà publiées. C’était en allemand et en roumain alors je n’ai pas compris grand chose. L’écrivaine roumaine s’appelle Liliana Corobca, elle a joué aussi, il y avait toute une mise en scène autour de son texte et c’était magnifique. Je vais lui demander la traduction en allemand et m’essayer à comprendre (avec l’aide de google traduction). L’autre écrivain était allemand, il s’appelle Dirk Schulte. Jean-Baptiste Joly le directeur de l’akademie m’a ensuite raconté les deux nouvelles lues et c’était original, j’ai regretté de ne pas connaître cette langue. J’espère que ces deux écrivains seront un jour traduits en français. Quant à moi j’ai lu un court texte sur la mort, écrit il y a deux semaines. Une femme l’a lu en allemand et une traduction a été faite en anglais (par la géniale J. A.). J’étais terrifié devant le public. Mon coeur battait à toute vitesse. Je n’ai pas voulu lire caché derrière un bureau. Je me suis donc assis sur une chaise, face à un micro, tout près des spectateurs. Je me suis présenté en bafouillant. Je m’appelle Martin Page, Ich heisse Martin Page. Hallo. Puis quelques mots en français. Heureusement le garçon qui s’occupait de la mise en scène a allumé un projecteur au dessus de moi, pour m’éclairer aux yeux des spectateurs, et qui en m’aveuglant les a fait disparaître à mes propres yeux. Je me suis donc mis à lire. Le voix un peu tremblante au début, puis rapidement ça s’est mis à aller. C’est une drôle de chose la voix humaine, les modulations que l’on peut faire, les inflexions que l’on peut donner. J’ai « sousjoué » le texte. Il était assez frappant pour ne pas en rajouter. L’actrice qui l’a lu en allemand l’a très bien fait, mais elle a, à mon goût, surjoué, faisant des effets alors que le texte invitait à ne pas en faire. De douces réactions de la part de quelques spectateurs à la fin, de l’émotion. C’est un texte qui devrait paraître au sein d’un recueil ; la personne qui met en oeuvre le recueil chercher encore un éditeur. Ensuite soupe moldave préparée par Liliana. Cela ressemble assez à une soupe russe.