La beauté des livres n’est pas une économie que l’on devrait faire. J’ai été frappé par la qualité de fabrication de nombreux ouvrages en Finlande. Souvent ce sont des hardcovers, et la jaquette est l’objet d’une création graphique, confiée à un graphiste ou à un dessinateur. Sentiment d’avoir une oeuvre en main, pas un assemblage de photocopies.
Le danger, ce n’est pas le numérique (ça fait des lecteurs en plus, qui achèterons des livres papiers, s’ils les voient comme de beaux objets). Ce sont les livres mal imprimés, sur du papier qui ne vieillira pas bien, avec des couvs typo ou moches. Les éditions de l’Olivier ne s’en tirent pas mal, mais le papier pourrait être meilleur, et pourquoi pas des hardcover ? et faisons travailler des artistes pour les couvs (bon dieu, vu le nombre de dessinateurs et graphistes talentueux que compte ce pays quelle tristesse de se contenter de piocher dans les banques d’images ou les catalogues de musées). Zulma, Sabine Wespiser, Hélium, Actes Sud, Le Dilettante (ça dépend des couvs), Finitude, Cornelius, Monsieur Toussaint Louverture, Attila, font de très belles choses. Mais la plupart du temps nos grands formats ressemblent à des paperbacks américains. C’est navrant. Et il y a ce symptôme : ce qu’on voit sur les livres français, c’est d’abord le nom de l’éditeur. En France, on se targue volontiers d’aimer les auteurs et les livres, mais cela ne se manifeste pas dans les faits. La littérature devrait se délivrer de ces amours institutionnels, passions d’héritiers, de bons élèves et de petits prêtres. Ce pays n’aime pas les livres et les écrivains, il aime en faire usage.
Le piratage un jour sera de se fabriquer ses propres éditions hardcover en beau papier de nos livres préférés.
Il n’y a pas de meilleur des mondes (peut-être les pays du nord de l’Europe, se renseigner). Contrairement à l’Angleterre, la France défend la librairie indépendante, il y a le prix unique du livre et la tva qui va baisser à nouveau (pas assez, comme pour la nourriture et le nécessaire, les taxes ne devraient pas exister). Il y a des bourses pour les auteurs, des aides à la traduction, des salons, des résidences. Mais la littérature serait plus forte si on confectionnait avec soin et talent les livres eux-mêmes. Un livre c’est une expérience sensorielle, excitante, érotique. La question est : pourquoi se priver de ce plaisir ?
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