J’étais au salon du livre de Colmar le week end dernier, l’occasion de refaire quelques pas en France. Rencontres avec des collégiens à propos du Garçon de toutes les couleurs. Je n’avais pas pensé qu’en parlant d’un enfant battu (ce qui ne me semble pas être le sujet principal de ce roman), cela intéresserait les écoles et les collèges, que mon livre serait un moyen pour aborder cette question. C’est d’autant plus étonnant (et rassurant) que ce roman n’offre pas de solution, il n’y a rien de facile dans ces affaires là, et personne ne peut se prévaloir d’un statut héroïque. Les rencontres avec les enfants sont passionnantes car ils n’hésitent jamais à poser des questions. Je dis les enfants, mais bien sûr il y a de grandes différences entre eux. Il reste que l’intérêt et la diversité des questions et des remarques sont plus grands que lors des rencontres avec les adultes (sauf aux Filles du Loir bien sûr). Mais passons. Depuis que je rencontre des classes j’ai une petit idée de la fatigue des professeurs, juste une idée car je parle à un public enthousiaste et bienveillant, je ne suis pas là pour donner un cours de maths. Malgré cela, j’en ressors épuisé. Une pensée pour une amie qui vient d’être embauchée par un lycée pour donner des cours. Contrat précaire, aucune préparation, aucun soutien de la direction. Et comme c’est la première fois qu’elle se retrouve devant des élèves on lui a donné des classes difficiles. Les gens qui critiquent les profs, parce qu’ils ne travailleraient que 15 heures par semaine et auraient je ne sais combien de mois de vacances par an, sont des imbéciles qui ne survireraient pas une semaine dans un collège (il y a bien d’autres raisons de critiquer les profs que leur emploi du temps).
Un salon du livre (ici essentiellement consacré à la littérature jeunesse) est l’occasion de faire connaissance avec des lecteurs, des libraires et des collègues. En occurrence j’ai rencontré quelques illustrateurs (surtout trisses) doués et charmants. Sinon comme à chaque fois que des êtres humains se retrouvent à plus de cinq quelque part, j’étais terrifié et j’ai pris garde de me tenir à l’écart. Cela a un côté « colonie de vacances » très démoralisant. Le grégarisme est une chose insupportable (et puis c’est triste de constater que les gens ont peur d’être seuls, d’être en dehors du groupe, alors ils se collent les uns aux autres). La meilleure solution consiste à se trouver des alliés et à faire un pas de côté. Parmi les belles choses de ce salon j’ai ainsi rencontré un auteur de science fiction français qui vit avec sa femme dans une maison à la campagne avec des chevaux et des chiens. Il ressemblait à un indien d’Amérique et il avait une sorte de sagesse simple, une absence d’ego, et une grande culture. Drôle de personnage, attachant , lui et sa femme étaient beaux, d’originalité et de sensibilité partagées ; nous nous sommes retrouvés à la même table lors d’un dîner (la table des bizarres) et c’était parfait. Évidemment nous avons parlé science fiction, rats, araignées et travail.