Pause. Je viens de me faire un Mi Yun de la Maison des Trois Thés, un de mes oolongs préférés (mais très fort, torréfié, je ne suis pas sûr d’avoir envie d’une deuxième tasse). J’ai ouvert les volets, que je ferme un peu à cause des reflets sur mon écran quand il y a trop de soleil (et ces dernières jours ont été trop ensoleillés, et c’est un mauvais soleil).
L’an dernier (le 26 juin), après avoir scellé le projet de la traduction du Wilde avec Arléa (Plume, Pinceau, poison), Diane m’a donné Le Livre de la Mémoire de Mary Carruthers (elle en est la traductrice). En un an j’en ai lu une centaine de pages. Je les relis de temps en temps, j’avance de quelques pages à la fois, rapidement mon cerveau surchauffe. Il y a des essais qui nous accompagnent toute une vie, des essais transversaux, dont chaque page est un banquet et une source. C’est le cas également de L’Art de la Mémoire de Frances Yates (livre traduit par le génial Daniel Arasse). En voici quelques extraits :
« (…) les représentations symboliques que nous nommons « écriture » ne sont guère que des amorces ou des déclencheurs pour les « représentations » mémorielles (tout aussi symboliques) qui fondent la cognition humaine. »
« Les philosophes antiques et médiévaux le savaient bien, pour qui toute information, quelles que fussent sa source et sa forme, devenait un phantasme dans le cerveau. Et ces phantasmata sont recouvrés grâce à des dispositifs heuristiques qui peuvent être forts différents de la forme sous laquelle l’information a été initialement reçue. »
« La « painture » comme le montrent clairement les remarques de Richart de Fournival , est avant tout une fonction des mots eux-mêmes. (…) Ces picturae purement verbales s’adressent directement à la mémoire du lecteur, car elles ne reçoivent forment picturales que dans son imaginativa et dans sa memoria. L’auteur est un « peintre », non seulement parce que les lettres avec lesquelles il compose ont elles-mêmes des formes, mais aussi parce que les mots peignent des peintures dans l’esprit des lecteurs ».
Mary Carruthers écrit aussi : (…) l’acte d’écrire est lui-même une sorte de mémoire (…).