Un américain bien tranquille, de Graham Greene, est un de mes livres préférés. Je le feuilletais ce matin, des phrases sont soulignées, des pages cornées, il y a des notes (sur la première page j’ai noté quelques événements de la journée où j’ai commencé à le lire la première fois, le lundi 4 octobre 2004). Les livres que l’on relit sont comme des chemins dans des bois familiers. On retrouve des traces anciennes, un arbre renversé, des racines, et on remarque de nouvelles choses à chaque fois. Quelques phrases soulignées :
« Il est impossible que vous existiez si vous n’avez pas le pouvoir de modifier l’avenir ».
« Tôt ou tard, dit Heng, et je me rappelai les paroles du capitaine Trouin, à la fumerie d’opium, tôt ou tard, il faut prendre parti. Si on veut demeurer humain ».
« La condition humaine étant ce qu’elle est, qu’ils se battent, qu’ils s’aiment, qu’ils s’assassinent, je ne veux pas m’en mêler. »
« Peut-être le civil est-il, aux yeux du soldat, l’homme qui l’emploie pour tuer, qui glisse le poids du meurtre dans l’enveloppe de sa solde, pour se débarrasser de toute responsabilité ? »
Et puis Greene est le roi de l’épigraphe. Au début du roman, il y a un passage d’un poème de Byron :
This is the patent age of new inventions
For killing bodies, and for saving souls,
All propagated with the best intentions.
(Cet âge est spécialisé dans les inventions nouvelles
Destinées à tuer les corps et à sauver les âmes,
Toutes propagées avec les meilleurs intentions -traduction Marcelle Sibon)
Graham Greene n’est plus beaucoup lu je crois. Dommage. Mais l’éclipse ne durera pas (comme celle de Gary est en train de s’estomper). C’est un romancier étrange, un des plus grands, ses livres sont fascinants.
Les commentaires sont fermés.