J’ai un projet de livre dessiné sur Wittgenstein. Il me manque un dessinateur (et j’imagine un éditeur un peu fou). Quand j’ai lu sa biographie j’avais tout le temps des images qui me venaient à l’esprit. Il a eu une vie très romanesque, d’action et de réflexion (et pour une fois, d’action menée par sa réflexion philosphique). Bien sûr je suis loin de comprendre sa philosophie (j’ai déjà du mal à ne pas pousser une porte quand il y a écrit « tirez » dessus), mais la surface qui m’est accessible est très stimulante. Je me sens intuitivement en sympathie. Je me souviens de Gilles Deleuze dans son Abécédaire quand arrive la lettre Z, Claire Parnet qui mène l’entretien lui demande ce qu’il pense de Wittgesntein. Deleuze est épouvanté, et en même temps amusé de son épouvante. Il dit :
« Non, je ne veux pas parler de ça. Pour moi, c’est une catastrophe philosophique(…). C’est très triste (…). Ils ont foutu un système de terreur (rires), où sous prétexte de faire quelque chose de nouveau, c’est la pauvreté instaurée en grandeur. Il n’y a pas de mot pour décrire ce danger-là. C’est un danger qui revient, ce n’est pas la première fois (…). C’est grave, surtout qu’ils sont méchants, les wittgensteiniens. Et puis ils cassent tout. S’ils l’emportent, alors là il y aura un assassinat de la philosophie. C’est des assassins de la philosophie. Il faut une grande vigilance… (rires) ».
Dans la biographie de Wittgenstein, il y a un passage qui m’avait frappé et enchanté : Ludwig poursuivant Bertrand Russel dans tout son appartement de Cambridge en lui criant » Prouvez-moi qu’il n’y a pas de rhinocéros dans cette pièce ! » Et Russell soulevant les coussins, ouvrant les placards pour montrer l’absence de rhinocéros dans la pièce. Mais cela ne suffisait pas à Wittgenstein. Oui un livre promet de belles scènes (j’ai vu le film de Derek Jarman sur Wittgenstein, je n’ai pas aimé, pas trop, je voudrais faire le contraire de ça). Il y aurait des cerfs-volants.