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prairie oyster

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Quand je buvais encore, j’étais beaucoup plus cool. Je commandais des prairie oysters (le cocktail magique contre la gueule de bois) partout où j’allais. En interview je disais même que c’était ma boisson préférée (en fait c’est un truc horrible). Bon, tout ça n’est pas vrai, mais j’avais imaginé un personnage qui devenait alcoolique à cause de sa consommation excessive de prairie oyster. Cela aurait été sacrément ironique. Je ne me souviens pas de l’époque où j’avais encore des gueules de bois. Avec l’entraînement, ça passe vite et on tient très bien l’alcool. Aujourd’hui j’ai arrêté de boire, je me lève de plus en plus tôt le matin (ouais je sais c’est caractéristique des personnages âgées), j’ai perdu les quelques fragments de coolitude que j’avais et je trouve ça parfait. Il est certain que je vais finir comme dans la Horde Sauvage sauf que moi, ma famille et mes amis nous n’aurons pas d’armes et nous ne nous battrons contre personne mais nous serons tranquillement installés dans des fauteuils sous une véranda d’une grande maison à la campagne pour boire un verre en discutant. Quand on est cool on perd un temps fou à faire des choses cools avec d’autres gens cools (ou des aspirants cools admiratifs), alors qu’on pourrait travailler ou regarder la fuite d’eau du ballon d’eau chaude. Etre cool c’est prendre le risque considérable d’être populaire et d’être invité à des soirées, des fêtes, des dîners. C’est la mort. L’enfer. Ne pas être cool me préserve d’avoir une vie sociale (qui se passe plus par emails que dans la vie physique). Rapidement quand je suis invité quelque part je me rends compte que je ne suis pas à ma place. C’est encore mieux : les gens qui m’invitent se rendent compte que je suis une sorte d’anomalie perturbatrice de l’ambiance cool de leur soirée. Pour la sauvegarde générale, après un geste entendu et un haussement d’épaule désolé, nous décidons qu’il est préférable que je quitte les lieux. Il y a toujours un bon film à voir, un bon livre à lire, un ami à appeler ou chez qui passer tard le soir pour ne rien dire de spécial mais avec qui être bien en buvant un lait chaud au miel.
J’ai 2000 miles, cette chanson des Pretenders, en tête je ne sais pas pourquoi. Les Prentenders ont repris deux chansons des Kinks, Stop you sobbing et I go to sleep.
Ma prof de flügelhorn est patiente (je lui ai conseillé de se faire prescrire des tranquilisants parce que je suis résistant à tout apprentissage). Mon do est bien, mon sol ne tient pas longtemps, le fa est bien aussi. J’arrive presque à jouer trois notes liées. Dans une quinzaine d’années je pourrais jouer Summertime ou bien Preciso me encontrar de Cartola. Il y a des choses qui ne vont pas dans le solfège. J’ai bien envie de réformer tout ça, pour le rendre plus logique et plus clair. Par exemple, les notes qui ont des noms dérivés, c’est une très mauvaise idée. Fa dièse, mi bémol… comment s’y retrouver ? Donnons un vrai nom à ce pauvre mi bémol (je propose « floc »), à fa dièse (« boum »), et ainsi de suite.
Bonne journée de travail. Ma paupière gauche papillonne, signe de fatigue. Ce soir je vais voir Le sens de la vie pour 9,99$, d’après des nouvelles d’Etgar Keret.
Dans la chanson des Pretenders, il y a cette phrase : It felt like christmas time. C’est peut-être pour ça.

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